Trusts en Israël: la nouvelle législation

Posted by on août 13, 2013 in Blog

Le 31 juillet 2013, la Knesset a entériné le projet de loi portant notamment réforme de la législation sur les trusts en Israël. La loi est entrée en vigueur dès le 1er aout 2013 mais les dispositions relatives aux nouvelles règles de taxation ne seront effectives qu’à compter du 1er janvier 2014.
Avant de prendre connaissance des modifications apportées par la loi du 30 juillet 2013, il convient de revenir rapidement sur les bases et le potentiel de ce montage juridique.

Nous connaissons en droit français la fiducie, récemment introduite à l’article 2011 du Code civil en ces termes :

La fiducie est l’opération par laquelle un ou plusieurs constituants transfèrent des biens, des droits ou des sûretés, ou un ensemble de biens, de droits ou de sûretés, présents ou futurs, à un ou plusieurs fiduciaires qui, les tenant séparés de leur patrimoine propre, agissent dans un but déterminé au profit d’un ou plusieurs bénéficiaires.

Le trust est le pendant anglo-saxon de ce montage, qui peut se résumer en une opération tripartite de transfert de biens, au sens large, par le constituant (settlor) au fiduciaire (trustee) afin que celui-ci les gèrent au bénéfice d’un tiers, le bénéficiaire.

La constitution de trusts en Israël est ouverte aux citoyens français, non résidents israéliens. Cela suppose pour le constituant français de confier ses biens, y compris la propriété, à un trustee israélien, souvent un cabinet d’avocats spécialisé, qui en assurera la gestion jusqu’à l’échéance donnée, en faveur du bénéficiaire, lequel peut être un tiers à l’opération mais également le constituant lui-même.

A partir du moment où le trust est formé, les actifs du constituant se retrouvent enregistrés sous le nom du trustee, et n’apparaissent plus dans le patrimoine du constituant.

De nombreuses opportunités de planification fiscale se trouvent dès lors offertes par ce montage, mais la récente modification de la législation fiscale applicable aux trusts appelle les observations qui vont suivre.

La législation israélienne prévoyait jusqu’à lors un régime d’imposition très favorable dès lors que le trust avait été constitué par un étranger (Foreign settlor trust). Ce régime a été quelque peu revisité. L’exemption n’est plus réservée qu’à un nombre de trust beaucoup plus restreint, comportant un double élément d’extranéité, constituant et bénéficiaire.
Par ailleurs, la loi a crée de nouvelles formes de trust avec leur régime fiscal propre, réservant toujours des dispositions particulières pour les non résidents israéliens ou les nouveaux immigrants.

I – Le renouvellement de la définition du « Foreign settlor trust » et le renforcement de l’imposition des trusts


Jusqu’à présent, le seul élément à prendre en considération pour déterminer la nature du trust était la nationalité du constituant, sans que ne rentre en ligne de compte la nationalité des bénéficiaires.

La logique est désormais différente. La loi nouvelle crée le « Foreign Resident Trust », exempt de toute imposition en Israël dès lors que le constituant ainsi que tous les bénéficiaires sont de nationalité étrangère.

Désormais, seuls les trusts dont le constituant et les bénéficiaires seront de nationalité étrangère seront exempts de taxe en vertu de la législation israélienne.

Pour les autres, dès lors que l’un des bénéficiaires aura la qualité de résident israélien, un nouveau régime d’imposition devra être appliqué : the « Israeli Beneficiary Trust ».

II – The « Israeli Beneficiary Trust »


L’Israeli Beneficiary Trust recouvre les montages constitués par un résident étranger mais ayant au moins un bénéficiaire résident israélien, lorsque le constituant et le(s) bénéficiaire(s) sont proches parents (conjoint(e), parent, enfant, grands-parents, petits-enfants) et que le constituant est toujours vivant (ou le conjoint dès lors qu’ils étaient mariés au moment où a eu lieu le transfert de biens).

Dans le cas où le constituant et le bénéficiaire aurait un lien de parenté plus éloigné, l’administration fiscale israélienne s’attachera à vérifier la bonne foi des opérateurs dans la constitution du trust ainsi que le caractère désintéressé du bénéficiaire.
Lorsque l’entité remplit toutes ces conditions, la nouvelle législation prévoit un nouveau régime d’imposition. L’assiette de l’impôt est alternativement le montant des actifs transférés (« distribution »), ou les revenus générés par ces transferts (« income »). Ce choix des modalités d’imposition relève du fiduciaire (« trustee ») et est irrévocable.

a) L’imposition des transferts
Le transfert au profit d’un bénéficiaire sera taxé en Israël à un taux de 30%, à l’exception du transfert des biens propres du constituant.

b) L’imposition des revenus de ces transferts

Les revenus du trust sont taxés à un taux plus bas que celui applicable au transfert. Le taux est de 25%.

Dans le cas où le trust ne remplirait pas l’une de ces conditions, il sera qualifié d’ « Israeli Resident Trust » et sera imposé sur ses revenus étrangers suivant le régime fiscal applicable à chaque bénéficiaire en fonction de sa nationalité.

III – Le trust des nouveaux immigrants (« New immigrant trust »)


Sur le même modèle que le Foreign Resident Trust, un trust constitué par un nouvel immigrant pourra bénéficier de l’exemption d’impôt décennale en vigueur concernant les revenus étrangers des nouveaux immigrants en Israël, dès lors que tous les bénéficiaires du trust seront de nouveaux immigrants.

La loi prévoit que ce régime ne sera applicable qu’aux nouveaux migrants arrivés après le 1er janvier 2014, et tant que ceux-ci seront en vie.

Le bénéfice de l’exemption d’impôt est étendu aux trusts dont les bénéficiaires ne sont pas de nouveaux immigrants mais simplement des résidents étrangers.

Le bénéfice de l’exemption est également reconnu si le trust est constitué après que le constituant ait immigré en Israël.

Dans le cas où le trust pourrait être qualifié d’Israeli Benificiary Trust du fait de la présence d’un bénéficiaire israélien alors même que le trust est par ailleurs constitué de nouveaux immigrants, un régime particulier est prévu.

La part des revenus attribuables aux nouveaux immigrants pourra bénéficier de l’exemption décennale, alors même que la part revenant aux bénéficiaires israéliens sera imposée selon le régime applicable à l’Israeli Beneficiary Trust.

IV – Le cas particulier du Charitable Trust


Le Charitable trust vise les trusts constitués par des résidents étrangers dont les bénéficiaires israéliens ne sont que des institutions publiques. Dans ce cas, le trust continue de bénéficier de l’ancien régime du Foreign Settlor Trust, et demeure exempt de toute imposition.

Ces entités publiques recouvrent au sens de la loi nouvelle toutes les institutions au bénéfice desquelles une donation à titre gratuit peut être réalisée en Israël et plus généralement toutes celles qui sont exemptées de taxes en application du droit israélien.

V  Nouvelles obligations d’enregistrement concernant les trusts étrangers


La création du trust étranger doit être notifiée dans les 30 jours suivants sa création par le trustee à l’administration fiscale israélienne.

VI – La clarification de la qualification des « Trust holding companies » (« underlying company »)


L’underlying company est une société qui détient les actifs du trust au nom du fiduciaire (« trustee »).

En droit israélien, cette société est « transparente », ce qui signifie que ses actifs et ses revenus sont considérés comme étant ceux du fiduciaire.

La société n’a pas à être enregistrée auprès de l’administration fiscale israélienne. Toutefois, les conditions nécessaires à la qualification de l’underlying company n’étaient pas tout à fait claires. Elles ont été davantage détaillées par la nouvelle loi.

La condition essentielle pour qualifier « l’underlying company » est celle de la détention des actifs du fiduciaire: : la société doit d’ailleurs avoir été créée dans le seul but de détenir les actifs du fiduciaire.

Il faut ensuite que la société ait été créée dans le seul but de détenir les actifs du fiduciaire.

Puis, dans le cas d’un Israeli Resident Trust, d’un Israeli Beneficiary Trust ou d’un Israeli Testimonary Trust, il faut que la société ait été enregistrée auprès de l’administration fiscale en tant qu’underlying trust dans les 90 jours de la constitution de ses statuts.

Enfin, le fiduciaire doit détenir à lui seul ou avec un unique associé, la totalité des parts du trust.

Lorsque la constitution de cette société fait échos à la constitution d’un Foreign resident trust, les revenus qui circulent à travers elles seront considérés comme des revenus étrangers, exonérés d’impôt en Israel.

Pour résumer, un résident étranger qui cherche à faire bénéficier de son patrimoine d’autres résidents étrangers (y compris sa propre personne), dispose de la possibilité de constituer via un administrateur israélien un trust en Israël. Les biens que le constituant transfère au trustee n’apparaissent plus dans le patrimoine du constituant mais de façon séparée dans celui du trustee ou encore de la société créée à cet effet.
Les transferts opérés ainsi que les revenus générés par les biens mis en trust sont tous considérés comme étant les revenus d’un résident étranger, et à ce titre exonérés d’impôt en Israël.