Suite d’une course effrénée entre une volonté fiscale d’encadrement du marché des actifs numériques sans cesse en mouvement
La fiscalité arrivera-t-elle à cerner cet outil révolutionnaire international ?
Au milieu de ce brouhaha fiscal mis à rude épreuve par l’innovation sans fin que représente les crypto monnaies, le législateur tente peu à peu de clarifier un sujet sans frontière toujours plus attrayant en termes de contrôles fiscaux eu égard aux sommes en jeu, mais plus facilement friable en termes de preuve.
Aussi, cet article aura vocation à exposer de manière simplifiée le droit en vigueur mais également les évolutions posées par le législateur français lesquelles seront applicables dès le 1er janvier 2023.
Il s’agira, dans un premier temps, de bien faire la distinction entre les gains de cession d’actifs numériques réalisés par les particuliers et ceux réalisés par les sociétés.
En effet, dans ce dernier cas il sera question d’appliquer un régime fiscal bien différent de celui appliqué aux particuliers, dit « des plus-values professionnelles », mais que l’on ne développera pas dans le présent article dans un souci de simplification.
Quels régimes fiscaux s‘appliquent aux plus–values réalisées par les particuliers ?
Par suite, et jusqu’au 31 décembre 2022, 3 régimes fiscaux sont applicables aux plus-values réalisées par les particuliers lors des cessions d’actifs numériques, à savoir :
- S’agissant des opérations réalisées à titre occasionnel, imposition au taux forfaitaire de 12,8% outre les prélèvements sociaux à 17,2% en sus, soit 30%,
- Si la plus-value est réalisée dans le cadre de l’exercice habituel d’une activité d’achat en vue de la revente desdits actifs, elle relèvera du régime des bénéfices industriels et commerciaux,
- Enfin, s’agissant d’exercice d’une activité dite « de minage » c’est-à-dire que les gains réalisés par le contribuable ne constituent pas un gain en capital résultant d’une opération de placement mais sont la contrepartie de la participation du contribuable à la création et au fonctionnement de ce système d’unité de compte virtuelle, le régime des bénéfices non commerciaux sera applicable.
A compter du 1er janvier 2023, et sous réserve de changement dans l’intervalle :
- Les plus-values réalisées dans un cadre professionnel seront imposées selon le régime de bénéfices non commerciaux et plus selon le régime des bénéfices commerciaux. Si la finalité reste une imposition au barème progressif de l’impôt sur le revenu, les modalités de calculs du bénéfice seront en revanche bien différentes.
- Les plus-values réalisées dans un cadre non professionnel et taxées en principe à un taux forfaitaire (12,8%) outre les prélèvements sociaux (17,2%), pourront sous option être imposées au barème progressif de l’impôt sur le revenu selon l’optimisation fiscale à retirer.
Qu‘est–ce que les actifs numériques ?
Par suite, il s’agira de s’enquérir d’une part de la définition des actifs numériques et d’autre part des opérations imposables.
En effet, partant d’un postulat de neutralité fiscale s’agissant des transactions ayant comme contrepartie un autre actif numérique et applicable aux particuliers réalisant des opérations de manière occasionnelle, il est impératif de poser les bases d’une bonne compréhension fiscale de cet outil.
En effet, les cessions d’actifs numériques ne sont imposables que dès lors que la contrepartie n’est pas un actif numérique, excluant ainsi les opérations d’échanges d’actifs.
En d’autres termes, le fait générateur de l’imposition ne sera déclenché que lorsque la contrepartie de l’opération de cession sera :
- Une monnaie ayant un cours légal (fiat),
- L’échange d’un bien (autre qu’un actif numérique) ou d’un service,
- L’échange d’un actif numérique avec soulte.
Concernant les actifs numériques à inclure dans les définitions du législateur fiscal, les articles L 54-10-1 et L 552-2 du code Monétaire et Financier, disposent :
« 1° Les jetons mentionnés à l’article L. 552-2, à l’exclusion de ceux remplissant les caractéristiques des instruments financiers mentionnés à l’article L. 211-1 et des bons de caisse mentionnés à l’article L. 223-1 ;
Plus particulièrement constitue un jeton « tout bien incorporel représentant, sous forme numérique, un ou plusieurs droits pouvant être émis, inscrits, conservés ou transférés au moyen d’un dispositif d’enregistrement électronique partagé permettant d’identifier, directement ou indirectement, le propriétaire dudit bien. »
(Article L 552-2 du code Monétaire et Financier)
2° Toute représentation numérique d’une valeur qui n’est pas émise ou garantie par une banque centrale ou par une autorité publique, qui n’est pas nécessairement attachée à une monnaie ayant cours légal et qui ne possède pas le statut juridique d’une monnaie, mais qui est acceptée par des personnes physiques ou morales comme un moyen d’échange et qui peut être transférée, stockée ou échangée électroniquement. »
Aussi, la loi exclue les actifs numériques remplissant les caractéristiques des instruments financiers ou Security tokens.
Quelles sont les incertitudes et les interrogations fiscales liées aux actifs numériques ?
Les stablecoins adossés à des monnaies fiat pourraient quant à elle ne pas être considérés comme des actifs numériques eu égard à une définition conditionnelle « qui n’est pas nécessairement attachée à une monnaie ayant cours légal ».
Enfin, une incertitude est à relever s’agissant des NFT (Non-Fungible Tokens) dès lors qu’ils ne constituent ni « un droit », ni un « moyen d’échange » mais représenteraient plutôt les caractéristiques d’un bien physique.
Par suite, les opérations ne portant pas sur les actifs numériques tels que définis par les textes, se verraient alors appliqués l’un des régimes fiscaux suivants, à savoir :
- Régime des œuvres d’art ou objets de collection :
- Imposition du prix de cession au taux de 6,5%
- Imposition de la plus-value (prix de cession – prix d’acquisition) au taux de 36,2%
- Régime des biens meubles – imposition au taux de 36,2%
Enfin, il est à noter la forme déclarative des opérations en lien avec les cessions d’actifs numériques :
- Formulaire 2086 de calcul des plus ou moins-values inhérentes à des opérations de cession d’actifs numériques,
- Formulaire 2042 C reprenant le montant final des plus ou moins-values portant sur des actifs numériques,
- Formulaire 3916-Bis en lien avec la déclaration d’un compte d’actifs numériques ouverts, détenus, utilisés ou clos à l’étranger.
Il en ressort dès lors que, si de nombreuses précisions/modifications administratives sont apportées par le fisc français, il demeure encore beaucoup d’incertitudes et d’interrogations qui devraient, à n’en pas douter, faire l’objet de compléments ultérieurs.
L’affaire est donc à suivre, et, dans l’intervalle, le Cabinet d’Avocats Abitbol et Associes, toujours à la pointe de l’actualité, se tient à disposition pour tout renseignement et accompagnement juridique et/ou fiscal.
NB : Cet article est donné à titre indicatif, par conséquent chaque dossier/cas devra faire l’objet d’une étude circonstanciée, en ce sens les informations contenues dans cet article ne sauraient constituer une consultation juridique.
66 Av Victor Hugo – Immeuble LEONARD DE VINCI Paris 16ᵉ
Tel: + 33 (0)1 78 90 03 73
Fax: + 33 (0)1 77 74 63 99
13 rue Shimon ben Shetah, 9414713, Jérusalem
Tel: + 972 (0)2 595 63 45
Fax: + 972 (0)2 591 63 26